Nous avons déjeuné ce matin avec les collines de la Crète qui défilaient à bâbord. Cette île grecque de 95 000 habitants montre une occupation humaine depuis près de cinq millénaires. Pour des nord américains comme nous, cette échelle de temps est inconcevable. On parle du berceau de la civilisation. Les Minoens furent les premiers à habiter la région de Chania. Malheureusement, les vestiges de leur passages se trouvent sous la ville actuelle et les excavations significatives sont impossibles.
Nous avons opté pour découvrir l’île en deux temps. D’abord, une visite dans un jardin botanique un peu à l’extérieur de la ville, puis un passage à Chania où nous pourrons l’explorer à notre guise.
Le jardin botanique de Askirdalos a une histoire tout à fait unique. L’île de Crète déborde de vergés d’oranges, de citrons et d’autres fruits. Au début des années 2000, un immense feu fit des ravages sur l’île. Un des propriétaires de vergés vit sa terre de vingt hectares se faire ravager par les flammes.
Découragé, il réfléchit à la meilleure façon de rebâtir. Il eut alors l’idée de faire un sanctuaire unique, dédié à l’écologie et la découverte. Il décida alors de transformer sa terre en un endroit d’agriculture naturelle et de recherche.
Notre guide Dimitris, un brillant mais grincheux bio-chimiste, nous raconte la genèse du parc avec beaucoup de passion. Il décida de se joindre au projet de son ami et servir de guide. Il profite aussi de l’auditoire pour passer son message écologique. Il parle des bienfaits de l’huile d’olive en terme très scientifique et objectif. Il parle aussi de la surconsommation de viande des humains et l’impact dévastateur sur la planète. Il parle de de l’importance des aliments naturels (bio). Il a un auditoire captif et il en profite.
Par la suite, il nous montre comment se prépare un plat typique de Crète. Le chef du jardin botanique vient rejoindre Dimitris et commence à couper différents légumes dans un grand plat: pomme de terres, oignons, piments, courgette, aubergines, etc. Il ajoute aussi plusieurs herbes fraîches, dont une de la famille de l’origan, mais beaucoup plus aromatique (j’ai oublié le nom).
Puis, Dimitris demande à une spectatrice de venir en bas de la scène pour l’aider dans une démonstration. La dame descend les marches et se présente à l’avant. Le guide lui donne une bouteille d’huile d’olive et lui demande d’en mettre sur le plateau de légumes comme si elle était à la maison.
La dame met ce que je considère comme assez généreusement, deux ou trois bons aller-retours.
Dimitris reprend la bouteille et dit: “Voici comment on met de l’huile d’olive en Crète”.
Il prend le couteau du chef et retire le goulot de plastique qui contrôle le débit. Puis, il vide la moitié de la bouteille dans le plat.
Je comprends que c’est du bon gras et tout, mais 200ml d’huile c’est bien du gras. On ne pouvait pas dire que le guide était mince non plus. J’ai donc retenu que l’huile d’olive c’est bon, mais en modération (comme tout finalement).
Le guide nous conduit ensuite à travers le jardin. Je dis jardin, mais on parle de 20 hectares. C’est donc plus un parc ou une réserve qu’un jardin.
Dire que le jardin possède une diversité de flore impressionnante serait un euphémisme. Il possède des centaines d’arbres fruitiers différents, des herbes, des plantes, des buissons. Le micro-climat de l’endroit leur permet d’avoir des plante tropicales, désertiques et méditerranéennes. À chaque 3 mètres, une nouvelle plante, un nouvel arbre. Dimitris nous arrête souvent pour nous passer ses connaissances: propriétés médicinales de certaines plantes, les particularités des arbres fruitiés, les origines des fleurs. D’ailleurs, partout sur les sentiers, les fragrances de ces fleurs et herbes viennent titiller nos narines. Notre cerveau peine à distinguer les nuances et cherche en vain à les reconnaître.
Notre groupe était assez dispercé et lent. Dimitris a perdu patience à quelques moments: “Allez le groupe, on n’a pas toute la journée”, “Excusez moi, c’est moi qui parle. Vous pourrez vous parler entre vous toute la journée après”. Sa frustration était plus sur le fait qu’il n’avait qu’une heure pour nous parler de son parc. Selon moi, on aurait pu passer une journée complète et il n’aurait pas tout dit.
L’heure passa rapidement et on était de retour au refuge où on nous a offert des tomates et concombres de leur jardin, avec leur huile d’olive et leur mélange d’herbes. Simplement wow. On avait aussi un petit shooter de Raki, une eau de vie de pêche très populaire en Crète. Au goût, c’était entre un Peach Schnaps et de la Grappa. Très bon.
On remonta dans le bus pour se rendre à Chania. Notre guide du bus nous montra quelques points de référence pour se retrouver dans la vieille ville. Puis, nous étions libres.
La vieille ville de Chania remonte au début du 13e siècle. Le vénitiens vinrent s’installer en Crète pour y fonder une centre de commerce à leur empire. Rapidement, l’endroit fut reconnu pour ses richesses qui y transitaient: soies et épices d’Orient, l’or, les bijoux. Des pirates de la Méditerranée ont commencé à trouver l’endroit une prise alléchante.
Les vénitiens ont donc décidé de fortifier la ville en construisant un immense mur de 5 km de long et quatre citadelles.
Il reste encore aujourd’hui une bonne partie du mur et de certaines de ces fortifications. Derrière, la veille ville se reconnait à ses petites rues, ses édifices colorés et fleuris et ses boiseries. En fait, on distingue encore l’influence de Venise sur l’architecture et le plan urbain. Le centre touristique principal est le port vénitiens qui consiste en une grande baie gardée par le phare à l’entrée. Partout autour de la baie, les terrasses s’enfilent les unes après les autres, avec leurs menus typiques, mais leur prix gonflés.
Derrière, la vieille ville est tout aussi commercialisée : restaurants, cafés, boutiques et hôtels s’entassent dans le quartier de quelques kilomètres. Nous nous sommes arrêtés à la Taverne Ela, un peu à l’écart de la baie. La terrasse est recouverte de vignes et de fleurs qui créent un ombrage naturel et qui donne un répit du puissant soleil et des 37 degrés. Le resto offrait un spécial qu’on ne pouvait refuser: une salade grècque à partager à deux, deux assiettes de souvlaki avec riz et patates, une corbeille de pain et deux bières. 19 euros. C’était moitié prix par rapport aux restos de la baie. Je recommande!
Autre chose surprenante de la ville, quatre religions coexistent ici depuis des centaines d’années: les orthodoxes (grecs), les catholiques (initialement les vénitiens), les juifs et les musulmans (autrefois les ottomans). Les quatres lieux de cultes se trouvent à deux minutes de marche l’un de l’autre. Comme quoi c’est possible d’avoir plusieurs religions en promiscuité sans déclencher de guerre.
Nous avons ensuite défait notre chemin pour revenir aux autobus. Deux endroits dignes de mention: d’abord il y a la rue du cuir. C’est un court bout de rue de la vieille ville où tous les marchands vendent des objets de cuirs: sac à mains, sandales, manteaux, etc. Historiquement, cette rue avait les cordonniers qui fabriquaient des bottes et souliers. Mais en ces temps modernes, qui fabrique des souliers à la main? Aujourd’hui, ce sont des revendeurs de matériel de cuir, principalement importés. Quoiqu’il semble que certains vendent des produits de Chania.
L’autre est le marché couvert, le premier marché couvert de Grèce. Ouvert en 1911, il abrite plusieurs petits commerces qui vendent des produits locaux (fromages, épices, fruits, etc.) ainsi que des produits artisanaux. C’est comme la partie couverte du marché Jean-Talon à Montréal. Les produits semblaient très attirants, mais la majorité ne pouvait être rapportés sur le bateau (dont certains fromages fêta qui m’appelaient).
En somme, la Crète est un endroit que j’aimerais visiter plus longtemps. Je crois que je pourrais y passer deux ou trois jours pour mieux la découvrir. C’est un des bénéfices des croisières: échantillonner de nouveaux endroits pour mieux revenir plus tard
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