Notre dernière journée en Islande était dédiée à la nature. Nous avons complété le fameux cercle d’or en visitant deux endroits de renom: le cratère de Kirith et le parc national de Thingvellir. On passe d’abord par la ville de Hveragerthi. La propriétaire de notre appartement nous avait conseiller d’aller visiter une boulangerie tout à fait unique qui fait cuire toutes ses pâtisseries avec la vapeur des cheminées thermales (Kjot & Kunst). Ils font aussi la meilleure soupe aux tomates au monde.
On arrive donc dans la ville (passablement désertée en ce dimanche matin) et on peut déjà goûter la pâte moelleuse des sucreries qui nous attend. On voit au loin l’affiche du commerce et immédiatement, quelque chose cloche. Le stationnement est vide. On est beau être dimanche, mais les commerces sont généralement ouverts à midi. On arrête la voiture devant la porte et on voit une petite affiche collée : « Nous serons fermés pour la saison à partir du 1er octobre ». Quelle déception. On reprend le chemin et tentons de sauver notre arrêt à Hveragethi en cherchant un endroit pour s’arrêter et marcher. La ville se trouve dans le creux d’une vallée et on voit se part et d’autres des colonnes de vapeur s’échapper des collines.
On tricote les chemins sinueux pour aboutir finalement dans un stationnement d’un golf. On présume que le golf est fermé (avec nos chums vent et froid, ça ne joue pas très bien). On sort nos sac à dos et nous nous apprêtons à partir quand on voit un cart de golf arriver. Sébastien part en éclaireur jaser avec le vieux monsieur qui arrive. S’en suit une longue discussion et je commence à me demander si Seb cachait le fait qu’il parlait islandais. Les hommes s’échangent des grands gestes de direction, puis le vieil homme repart. Sebastien revient vers nous. « On ne peut pas se stationner ici? », je demande. « Non, ce n’est pas ça. », explique-t-il, « Disons que son anglais était limité. Il a pointé quelques minutes par là-bas, pis moi je disais qu’on voulait aller vers les colline. Ça s’est terminé par lui qui disait ‘Non, c’est trop long, vous n’avez pas le temps’. Donc, chu pas trop certain ». C’est à ce moment que la pluie décide de faire son apparition sans fanfare ni trompette. La motivation de marcher sur les collines a passer de 2/10 à -3/10 en une fraction de seconde. Je crois qu’il n’y avait que Vince et Nadia qui dépassaient le 0/10, mais eux avait des vêtements pour traverser l’Antarctique. Il n’y avait rien à leur épreuve. On décida en groupe de remonter dans la voiture et passer immédiatement à l’étape 2 de la journée. Hveragerthi était perdu. Nous n’avions que quelques kilomètres à faire pour se rendre au cratère de Kirith. Le cratère est un vestige d’un ancien volcan qui a vu sa chambre magmatique s’effondrer. Le résultat est un spectacle de contraste de couleur surprenant. La terre rouge et noir s’entremêle à la végétation dorée et vert, le tout glacé d’un lac bleu ciel au centre.
Le cratère lui-même, formé il y a 6500 ans, mesure 270m par 170m et 70m de profondeur. La profondeur du lac au centre varie entre 7m et 14m. Un long sentier longe le dessus du cratère puis descend vers le lac et se poursuit faire le tour du lac au complet. C’est un site géologique impressionnant par son ampleur, mais surtout pour le coup d’œil. Même avec le ciel couvert, nous avons réussi à prendre plusieurs belles photos.
Nous reprenons la voiture pour bifurquer vers le nord et aller au parc national de Thingvellir. Cet immense parc est dominé par un grand lac au centre. Cependant, il est surtout reconnu pour son passé historique. Le premier parlement d’Europe fut fondé sur les flancs de falaises du parc au 9e siècle. Les environs du centre des visiteurs sont lacérés par le longue fissures dans la terre, signe que l’île est littéralement déchirée à cet endroit. Certaines de ces fissures ont plusieurs centaines de mètres de long et parfois plusieurs dizaines de mètres de profondeur. C’est un parc où il faut éviter de sortir des sentiers battus, une fissure peut facilement se cacher sous le mou lichens vert.
Nous empruntons donc le premier sentier qui est en fait un chemin. Cette section est fortement touristique et le chemin est accessible à tous. Les paysages sont spectaculaires. À notre gauche, une falaise de basalte de 20m dont les pierres semble en équilibre précaire les unes sur les autres et qu’un simple coup de vent pourrait les faire tomber. À droite, de longue plaines de pierre noire et de végétation nordique à perte de vue. Derrière, une rayon de soleil perce les nuages et fait dore le lac au loin. Mais, c’est le fond du décor devant nous qui coupe le souffle. Une chaîne de hautes montagnes dont les flancs blanc immaculés par la neige viennent donner un aspect féerique au moment.
Nous avançons donc sur le chemin en admirant la scène et en prenant de grandes bouffées d’air frais. Sous le coup de l’émotion, on n’avait même pas remarquer que vent, froid et pluie nous avait quitté. À la croisée du sentier, on monte quelques marches à gauche pour remonter vers la falaise. Sur le plateau plus haut, le sentier revient sur lui-même pour s’enfoncer dans un corridor encadré de hautes rochers. Au bout, on voit le soleil finalement vaincre les nuages et le grondement de l’eau qui tombe. Après quelques mètres, on arrive enfin à la chute de Öxarárfoss, probablement un des plus beaux moments du voyage.
L’œil bien rincé, on revient sur nos pas et nous empruntons un sentier moins fréquenté qui s’enfonce vers les plaines. Le premier sentier est relativement bien balisé, car il est aussi emprunter par les chevaux à l’occasion. La végétation est courte, mais bien vigoureuse. Beaucoup d’herbe basse et de lichen d’un vert très vif, mais il y a aussi quelques arbustes. Nous avançons les 5 en silence, savourant le moment. On s’arrête à l’occasion pour admirer le paysage autour : les montagnes blanches, les impressionnantes fissures dans la terre, le jeu de couleur de la végétation. J’ai souvent dit que parfois, les moments les plus simples sont les meilleurs.
Après environ 2km, nous arrivons littéralement à la croisée des chemins, ou dans ce cas-ci à la croisée des sentier. Il y a une demi-douzaine de sentier qui se rencontrent à cet endroit. On change alors de sentier pour se diriger vers le stationnement. Ce dernier sentier de 2.5km est beaucoup plus rustique: mince, rocailleux et plein de boue. On avance plus tranquillement, surveillant nos pas, et on se laisse chauffer par le soleil qui a finalement décidé de venir nous voir.
On accélère les derniers mètres, car un gros nuage gris s’avance rapidement sur la plaine. Une expression de l’Islande dit : « Si tu n’aimes pas la météo ici, attends 5 minutes ». Vincent a même trouvé un t-shirt avec l’expression dans un magasin souvenir et il a failli l’acheter. Et bien, sur ce sentier, 5 minutes plus tôt, nous étions au soleil, il faisait chaud et nous avions dezipper nos manteaux. Littéralement 5 minutes après (je n’exagère pas), c’était ça :
Un blizzard de neige intense. Le temps de marcher au stationnement (10 minutes), c’était fini. Nous avons ri pendant tout le long, absolument abasourdis par la situation. C’était simplement irréel. Nous sommes ensuite retournés à la voiture et revenus à l’appartement pour un dernier souper de gang. Nous avons bien mangé, nous avons eu du plaisir et nous avons bien rigolé. C’était ma première expérience de faire un voyage avec des amis. Dans les voyages, c’est souvent les personnes avec qui ont le partage qui donne de la valeur à l’expérience. J’ai retrouvé dans Nadia, Vincent et Sébastien des partenaires d’aventure exceptionnels. Pour moi (et je suis pas mal certain que pour Nathalie aussi), ce fut un voyage mémorable et je vais raconter les anecdotes et histoires de notre groupe de joyeux lurons pour très longtemps.
Comments